O comme Odette

La sonnerie du téléphone et, une heureuse nouvelle au bout du fil…

L'instant magique lorsque la famille s'agrandit !

Même si, plus d' fil au bout du fil :) 

Odette ne cache pas son émotion... En ce début d'année 2024, elle vient tout juste de devenir arrière-grand-mère, d'une petite fille si pressée de la rencontrer qu'elle en a pris ses avances, trois semaines… Oh la la ! Heureusement, les inquiétudes de janvier, en mai se sont estompées, même si l'on reste toujours un peu sur ses gardes, lorsque l'on est parents...

Des pleurs au milieu de la nuit, à la première dent qui perce, à la lolette oubliée quelque part, allez savoir... Aux p'tits boutons de varicelle... Et je n'vous dis pas quand ça grandit... Etre, papa, maman, c'est toute une histoire !

Oh que oui ! Elle connait bien tout ça, Odette

Même si parfois, ça n'se passe pas exactement comme cela...

Aujourd'hui, elle a tant à lui raconter à cette petite, à lui transmettre notre aïeule*

*Oups-là ! Désolée Odette, un mot qui n'rajeunit pas :)

Une minime part de son histoire, de ses racines entremêlées...

Parce que de Odette à Giulia, il n'y a qu'un pas...

De GEANT ! Quatre-vingt ans :)

Jusqu'où nos souvenirs d'enfants peuvent-ils nous emmener ?

Du tout premier jour de notre existence... Le sein d'une mère qui vous a rejetée alors que vous n'aviez rien demandé, si ce n'est d'être aimée.

De cet instant, elle ne s'en souvient pas Odette, mais plus tard, on lui racontera…

Comment de l'Hôpital des Bourgeois à Fribourg, on l'a ramené à Broc en ce début août 1943, dix jours après sa naissance. Son chez-soi, qu'elle ne quittera, plus jamais...

Ses parents, Aloïs et Martine Andrey-Sudan, venaient tout juste de perdre leur 2ème enfant quelques mois plus tôt, un petit Emile âgé de six ans, emporté par la diphtérie. Une tragédie d'autant plus terrible qu'ils avaient déjà perdu leur aîné William, à l'âge de six mois.

Alors cette petite, elle arrive comme un cadeau tombé du ciel ! Toute emmaillotée dans son couffin.

Son père travaillait à l'atelier mécanique de la Nestlé, et à ce moment-là, un Monsieur qui s'appelait Wider, conseiller communal en charge des affaires sociales, était passé le voir afin de lui demander s'il serait d'accord avec son épouse, de prendre en pension une petite fille dont la génitrice,* sommelière au Tilleul, n'en voulait pas

 "Vous demanderez à votre Dame" lui avait-il dit.

*Le mot est fort, aujourd'hui encore Odette n'en n'a pas d'autre à son égard, même si elle a hérité de ses yeux et de son nom, inscrit au registre des naissances.

C'est donc comme ça qu'elle arrive du jour au lendemain chez les Andrey, à Broc. Une petite maison à la Rue de Montsalvens, dont le propriétaire était photographe.

Il l’a prise si souvent en photo

M Brülhart, faut dire qu'elle est si craquante...

Pour Martine et Aloïs, c'est un véritable rayon de soleil, une évidence... elle devient immédiatement leur petite fille, gardant pour eux le secret de sa naissance.

Et c'est tout pareil pour sa famille, Séraphine la Grand-Mère, l'Oncle Henri de la scierie juste en face, actuel emplacement du magasin Denner, Tante Anna, soeur de sa maman, chez qui Odette passe toutes ses fins de semaine à Bulle dès l'âge de 4 ans, suite aux problèmes de santé de sa maman, qui peine à marcher après plusieurs attaques, comme on dit à l'époque.  Alors le samedi matin, on la met dans le train, et sa tante la récupère à la gare de Bulle. Parfois, elle y va même le jeudi, jour de congé.

Ah ! Elle se voit encore assise dans le wagon vert des GFM, intérieur banc et sièges en bois vintages, avec deux barres de fer et un filet servant de porte-bagages. Un train toujours bondé, les garçons qui allaient à l'école secondaires, alors que les filles n'y étaient pas admises... Invraisemblable !

Les voilà tous, devant la ferme de l’oncle Henri, à la Rue Pessot. Une petite fille, Odette, sa maman tout en haut à droite, son papa à l’opposé au 1er rang, et ses oncles et tantes.

Quelques années plus tard, la famille emménagera à Broc-fabrique, avant de revenir au village, où ils partagent demeure avec sa tante Alodie, durant 36 ans

Aujourd’hui, chez Mado, Bourg de l'Auge. 

Son village d'antan, elle s’en souvient comme de sa poche Odette. L'ancienne pharmacie Marmillod par ex., située à côté de l'Auberge des Montagnards, où sa mère l'envoie chercher des sangsues dans une petite fiole en verre, sur ordre médical. Une sorte de limaçon tout noir et très intriguant pour une enfant, que l'on dispose dernière l'oreille, afin qu'il vous suce le sang. Berk ! Pauvre maman... Le médicament du moment pour faire baisser la pression artérielle, toujours d’actualité…

Elle se souvient aussi de l'imposante demeure du Docteur Vaucher, n° 1 de la Rue du Tir, et celle des Joye, tous deux médecins, qu'elle avait dû aller chercher une fois de toute urgence, à pied, faute de téléphone ; les parents de Pierre, dit Pily, à la Rue du Prieuré, qui plus tard prendra la relève, médecin à son tour.

Sa mère venait de faire un AVC, une raison suffisante pour expliquer son retard à l'école ce matin-là... Mais, c'était sans compter sur l'indulgence des soeurs institutrices, qui déjà ne l'avaient pas à la bonne, ne la voyant jamais à la messe du dimanche, ni même aux vêpres…

Evidemment, elle était à Bulle !

Ce jour-là, elles l'avaient traitées comme une BOURRIQUE !  dixit Odette

Ah ! Les bonnes soeurs…

Elles logeaient à l'école sous les combles, et de là-haut elles voyaient tout ! Surveillaient tout ! Dans la cour de récré, c'était les filles d'un côté, les garçons de l'autre, et pas question de mettre un pied dans le gravier opposé.

De vraies peaux ! Odette ne mâche pas ses mots !  

Une fois, la voyant discuter avec un jeune homme, remplaçant du chef de gare que ses parents connaissaient, une des nones l'avait réprimandée, ou plutôt, ramassée le lendemain en classe ! L’accusant de courir après les garçons; une gamine de 10-11 ans…

Et cette autre fois, qu’elle n’oubliera jamais !

Comme tous les matins à la sonnerie, elles devaient se mettre en rang les filles, sans un bruit pour entrer en classe; mais voilà qu'une de ses camarades la nargue

“Mon frère ne sort plus avec toi ! Une histoire de gamine.. Nanana !”

Bien sûr qu'une des nones les a entendues, et une fois en classe, elle se ramasse une de ces baffes Odette, abasourdissante !

Non seulement par le geste, mais surtout par les mots...

"Toi aussi tu cours après les hommes, tu seras comme ta mère,

tu auras des enfants et puis, tu les abandonneras ! "

. . . Alors là ?!?

Une véritable calomnie de la bouche d'une religieuse,

qui attirera les foudres de ses parents, mettant son père

Hors de lui !

Eux qui avaient tout fait pour la protéger

leur petite…

petite fille de COEUR

Une histoire qui aujourd’hui, la bouscule encore Odette, rien que d’y penser…

C’’est donc comme ça qu’elle apprendra les circonstances de sa naissance,

d’une méchante langue !

Ce qui ne changera en rien, les liens tissés-serrés avec ses parents…

Par la suite, elles quitteront le village les nones, cédant leurs places à une toute jeune institutrice, Mademoiselle Perritaz, alias Lulu Savary. 

Il était temps !

Et pour terminer, une photo souvenir de sa maman

dédicacée plus spécialement à ses enfants, petits-enfants,

et arrière-petite-fille Giulia :)

“Une formidable famille qu'elle s'est construite à elle seule, et dont elle est si heureuse et fière”

Merci Odette !

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